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Francine Caron

 

Cantate

Mon corps d’homme
infini
doux et tendu,
de sang mordoré qui roule _

mon corps de conquête et de rêve,
insistant,
éperdu et sauvage,
grondant ses rythmes,
aux muscles qui scintillent,
aux joies hurlées qui cassent –
Mon essentiel –

Toi, mon corps parcouru,
ses gouttes d’origine qui précèdent,
mon corps descendu,
mon corps de plénitude forte qui me fend,
me fait de fleurs flottantes,
mon corps qui pénètre
aux fonds noyés de moi –

Si fière d’être femme,
et entr’ouverte doucement, tapie d’ivresse –

Tu t’inclines,
bouleversé de tendresse,
tu t’abats
comme au souvenir des silences
Déjà
mien à demi,
le gland qui hante
et reconnaît
son seuil,
ses sentiers,
sa tanière riche et musquée,
son fort –

Et puis tu remplis tout,
tu assièges,
tu me damnes,
les chairs plissées jumelles et reconnues,
mon con écartelé, heureux,
tout mon corps délivré, offert, semé, clouté,
exhaussé par la fête rouge qui le comble,
Ma vie au bout de ta tige qui joue
et cueille –

Tu es, tu t’avances à l’intouchable,
j’ouvre ma bouche, toutes mes bouches,
les genoux rejoignent leurs pôles,
je suis un ventre communié
qui danse,
attend et n’attend plus ses rives ;
Tu me suspends

Et tu repars,
trempé de mousse
et tu t’appuies des clés aux fourches,
Torturée, je suis un tunnel qui supplie,
la forme du pain qui veut l’enfournement,
le feu ouvert qui guette ses tisons.

Implacable, tu vas de la crête
au bord diurne,
effleurant durement,
t’affirmant,
hérissé de maîtrise,
tu sculptes bien, défonçant tendrement l’estuaire.
De biais, je chante –

Voici que je te laisse
et me dresse et détourne,
nous sommes l’animal sacré,
tes doigts pressent la perle en son destin,
moi, je, complètement donnée,
les seins pendant comme un collier –
et toi, insinué d’un coup de cœur,
tu te fiches,
immobile.
En gloire.

Puis tu vires de bord,
le désir te distend ;
tu fonces sans égards, corne de nuit
tu traques –

Oh cheval immortel,
entré enfui, rageur et délicat,
dégouttant de mon stupre de marais,
je suis défaite et vierge,
et reconquise,
inhabitée, douloureuse et choisie.

Et le rythme des planètes soudain croît,
la croupe suit le cirque du ciel,
tu as forgé et
le con du monde s’amplifie,
le feu le vrille
l’eau le baigne
la terre le possède
les airs l’entourent.
La matrice respire, ses portes tremblent,
touffeur collée au champignon divin,
suçant ses rêves, fleuve et son lieu,
et les vagues du sang s’élancent.

Tu sais, tu brandis ma jouissance,
furieusement, tu fouilles et tu décimes
et je tangue,
et je jette,
et j’annule et trépigne
et je fous,
tout s’ouvre à fond et broie
comme un tonnerre, un volcan d’eau,
le feu dégoulinant de joie.

C’est l’enfer d’algues
et l’empire des gouffres –
Et toi aussi, tu montes et meurs –
la matrice espérante
t’a bu comme un calice,
épousé à folie –

Les eaux mêlées,
les poils rivés,
Tous deux,
l’immensité du couple,

Toi, qui as ramé par le monde jusqu’au loin,
Moi, pleine de ta semence lourde,
illuminée,
immolée et
naissante -”

 

Francine Caron – Recueil “Les corps sourciers”

 

Une des plus beaux poèmes érotiques écrit par une femme que j’ai lu jusqu’à présent. Je te l’offre, amour, @toile-invisible

Ce jour , rien n’a changé, tu es toujours le premier homme , celui qui m’inspire mes plus ardentes, intenses, érotiques, émotionnelles lectures, découvertes et écritures de poésie amoureuse