Claude de Burine

Je n’habite nulle part.
Je n’ai plus de chair ni de cœur
Je n’ai que le souvenir
Qui tinte comme un glas.

Ma mémoire est de feuilles
De soleil et de brumes
De neige et de givre
Lorsque l’hiver est roi

Je n’ai plus ni pays
Ni maison,
Ni regard.

Je serai le chien qu’on écrase

Claude de Burine


À Noël — dernière lettre

   Tu m’as tout pris
L’extraordinaire, le simple,
Le complexe, le quotidien,
le rêve, l’entente.

Il ne me reste rien
Pas un coin de nappe oubliée
Pas un morceau de pain sur la table
Pas un coin de fenêtre
Sur la nuit et le jour

Il ne me reste rien
Pas une forêt sur la terre
Ni une mousse
Ni une fleur
Ni une feuille d’arbre
Pas une teinte de ciel

Cet oubli du monde au réveil
Ces yeux mi-clos sur l’âme
Ma dernière chance d’hiver
Mon dernier ciel sur la neige
Tu me les as pris
Tu m’as pris jusqu’à la seconde d’oubli

Je m’échappe à moi-même
Je me coule entre les doigts
Et je ruisselle sur ma vie
Comme sur une plaine morte

Je pense à vous
Les mots sont neufs
Fondants comme une rose de Noël
Dans l’arbre
Avec ses surprises, ses flammes, sa légende

Marcher avec toi
Me mettre du rouge avec toi
Du rouge aux lèvres
Du rouge aux ongles
Du rouge au cœur

Retrouver le monde avec toi
Dans mes deux mains
Parce que tu m’auras conté
Une pluie au printemps
Ou un cuivre qui fait l’amour
Avec le soleil

Mourir de ta chair en moi
M’endormir et rêver que je rêve de toi

Quand je reste seule
Je tends mes doigts vers ta réalité
Qui est la mienne

T’avoir pour maître
Oh ! Cette chance, ce miracle
Ce don de toi à mes côtés

Attendre
Pour te réinventer
La venue inouïe de ton visage
Connaître ton visage
Connaître ton baiser
Connaître ton amour
En mourir, en mourir.

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