(Pierre-Yves Tremois)
« Hors du soleil, des baisers et des parfums sauvages, tout me paraît futile… »
Albert Camus – Noces
(Suzie Q)
Il est des noms comme des fleurs étouffantes
Il est des regards comme des flammes dansantes…
Il est des bouches sombres et ondoyantes,
Avec des coins profonds et humides.
Marina Tsvetaïeva – Insomnie et autres poèmes
(Francesco Hayez)
Au dire de certains, je donne des baisers trop raffinés, tels que nos rudes ancêtres n’en connurent jamais. Ainsi donc, quand je serre de mes bras avides ton cou, ô ma Lumière, et que je meurs sur lui de tes charmants baisers, faut-il me soucier de ce qu’on dit de moi ? C’est à peine alors si je puis me rappeler qui je suis et où je suis.
Jean Second – Le Livre des baisers – 11 – Jean Second(André Kohn)
Lait
Le baiser est un mot de gouache
Il rend aux lèvres cette transparence continuelle
Que la parole, le repas et la vie, rendent habituellement
Rousses.T’embrasser signifie détremper à la salive
Tous les pigments de tes lèvres,
Jusqu’à la lustrine, au vernis,
La gomme.Je ponce tes lèvres, et je les racle et je les purifie,
Et je les enduis.
As-tu remarqué que le désir à la pâte d’un œuf entier
Mêlé à du lait de figue ?Moins que la colle, presque la résine,
autant que le vernis, autour de l’huile
Je laisse sécher ta salive
Jusqu’à ce qu’il y ait entre tes lèvres
Un fil de réflexion.T’embrasser est un long travail
D’émulsion ancienne.Régine Detambel – Recueil “ Icônes” – Ed. Champ Vallon
(Ron Hicks)
Le cœur tremblant, la joue en feu,
J’emporte dans mes cheveux
Tes lèvres encore tièdes.
Tes baisers restent suspendus
Sur mon front et mes bras nus
Comme des papillons humides.
Je garde aussi ton bras d’amant,
Autoritaire enlacement,
Comme une ceinture à ma taille.
(Une peinture de Joseph Lorusso)
Je me souviens de toi telle que tu étais en ce dernier automne:
un simple béret gris, le cœur en paix.
Dans tes yeux combattaient les feux du crépuscule.
Et les feuilles tombaient sur les eaux de ton âme.
Enroulée à mes bras comme un volubilis,
les feuilles recueillaient ta voix lente et paisible.
Bûcher de stupeur où ma soif brûlait.
Douce jacinthe bleue tordue sur mon âme.
Je sens voyager tes yeux et l’automne est distant:
béret gris, cris d’oiseau, cœur où l’on est chez soi
et vers eux émigraient mes désirs si profonds
et tombaient mes baisers, joyeux comme des braises.
Ciel vu d’un bateau. Champs vus des collines:
lumière, étang de paix, fumée, ton souvenir.
Au-delà de tes yeux brûlaient les crépuscules.
Sur ton âme tournaient les feuilles de l’automne.
PABLO NERUDA
(Roberto Ferri)
Qu’homme étrange je désire la bête en nous qui palpite fume crépite entre mes griffes et rôde tourne vire derrière tes canines…
(Laurent Anastay-Ponsolle)
« L’odeur – par la porte grande ouverte d’un bistrot – de vanille – de cigares – de biscuits – semble t-il. Vous pensez que j’ai eu envie de rentrer dans ce café, de boire et de manger ? Non – les larmes aux yeux – d’embrasser. »
Marina Tsvetaïeva – Les carnets 1913-1939